La 2ème Guerre mondiale laisse la France en ruines avec 260.000
bâtiments détruits et plus d’un million d’endommagés c’est au total près de 2,3
millions de logements d’habitation affectés. En 1945, l’État tente de fournir
un abri aux 6 millions de sinistrés. La priorité est au déblaiement des ruines.
Il faut trier, récupérer ce qui peut l'être, réaménager les bâtiments
existants, réparer les immeubles endommagés et construire des habitations
provisoires. La tâche est immense. Mais il faut avant tout déminer sur plus de
500.000 hectares, 13 millions de mines, 17 millions d'obus et 500.000 bombes.
Malgré des conditions invraisemblables de travail et le manque de main d‘œuvre,
le déblaiement et le déminage sont réalisés en un temps record. 500.000
immeubles sont réparés.
Au sortir de la guerre, la famille représente la référence centrale et l’entité de base du nouveau système de régulation sociale. Le ministère de la population est créé ainsi que le régime général de la sécurité sociale. Le quotient familial est introduit dans le calcul de l’impôt sur le revenu. En août 1946, est voté le régime des prestations familiales.
Le souci du nouveau législateur est de s’appuyer au plan local et national
sur des associations représentatives des familles. L’ordonnance du 3 mars 1945
institue une représentation de l’ensemble des familles françaises et étrangères
vivant en France en créant l’Union Nationale des Associations Familiales (UNAF)
et ses représentations Départementales (UDAF). En novembre 1945 pour son
assemblée constitutive de l’UNAF, 60
UDAF sont déjà crées.
Pour la 1ère fois, dans l’histoire du mouvement familial, une
organisation allait représenter de manière permanente les familles.
La politique du logement est résolument familialiste. La commission de
l’habitation de l’UNAF, présidée par Guy Houist, va faire des propositions qui
constitueront la base de la loi de 1948, et établir la nécessité d’une
compensation du coût du logement par des allocations de logement exclusivement
familiales.
En 1946, au Congrès de l’Union Confédérale des Locataires, l’organisation devient la Confédération Nationale des Locataires et des usagers du gaz et de l’électricité. Elle définit alors ses trois mots d’ordre, « Réparer, Reloger, Construire ». Elle demande la réquisition des logements vacants, la municipalisation du logement, la taxation des loyers, un moratoire sur les expulsions et surtout, la construction massive de logements « gais et salubres » accessibles aux familles modestes. Le logement n'est pas un bien comme les autres.
C’est en 1973, à son congrès du
Havre, que la Confédération Nationale des Locataires décide d’élargir son champ
d’activité et prend pour dénomination « Confédération Nationale du
Logement (CNL) ».
Le Mouvement Populaire
des Familles (MPF), issu de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC) mène une
grande campagne pour la reconstruction et décide la création en son sein de
commissions logements. Une série d’expositions sur le logement est organisée.
Fin 1946, des
opérations exemplaires de squats sont organisés à Marseille, pour
contraindre les pouvoirs publics à faire appliquer les mesures de réquisition
de l’ordonnance de 1945. Nice, Rouen et Angers et bien d’autres villes suivront
l’exemple.
En juillet 1949, au
congrès de Villeurbanne, le Mouvement Populaire des Familles (MPF) devient le
Mouvement de Libération du Peuple (MLP). Quelques mois plus tard, la création
par l’épiscopat français du mouvement, l’Action Catholique Ouvrière, scellera
la déconfessionnalisation du mouvement.
La laïcisation trop
affirmée du MPF et la nouvelle orientation politique conduiront en mai 1951 à
une nouvelle scission. Les militants de la puissante fédération du Nord
refusent de s’aligner sur des positions qu’ils jugent trop proches du Parti
Communiste Français et créent le Mouvement de Libération Ouvrière. En 1952 se
constitue la Confédération Nationale des Associations Populaires Familiales.
Le MLP deviendra l’Union de la Gauche Socialiste en 1957, puis le Parti Socialiste Unifié (PSU). Ce même Mouvement donnera naissance à la Confédération Nationale des Associations de Familles Ouvrières qui se transformera en 1959 en Confédération Syndicale des Familles (CSF). En 1975, elle est agréée comme association de consommateurs.
En 1976,
elle se transforme en Confédération Syndicale du Cadre de Vie et aujourd'hui
Consommation Logement et Cadre de Vie (CLCV).
Le redressement économique du pays accentue le phénomène d’exode rural. La reprise nécessite un besoin supplémentaire de main d’œuvre étrangère. De 1921 à 1939, la population urbaine était passée de 18 à 21,5 millions pour atteindre 25,5 millions en 1954. En 1962 la population urbaine s’élève à 31,3 millions.
La rentabilité de l’investissement immobilier est
faible. La décolonisation entraîne le retour des français établis en Indochine,
Maroc, Tunisie et Algérie. En 1962, près d’un million de rapatriés d’Algérie sont
à loger en quelques mois. Le Baby-Boom de l’après-guerre crée de nouveaux
besoins en logements. Enfin la structure de la famille évolue de la famille incluant
plusieurs générations, la famille se réduit alors aux seuls parents et enfants.
La situation est catastrophique : 45% des logements sont surpeuplés,
dont près de 30% de manière critique, et 10% sont insalubres. Le confort est
rudimentaire : 90% de la population n’a ni baignoire ni douche, 80% pas de WC
et 48% pas l’eau courante. 640.000 personnes logent à l’hôtel. De très
nombreuses familles vivent dans des taudis, de véritables ruines ou baraques en
demi-lune.
La construction de nouveaux logements
tarde. La crise s’installe durablement. Elle touche non seulement les familles
populaires mais aussi les classes moyennes. Le surpeuplement est la règle et
l’état des immeubles est lamentable. La loi du 28 octobre 1946 exige, pour les
sinistrés de la guerre, la reconstruction à l’identique, et rend impossible la
production en masse de logements.
La loi de 1947 augmente fortement les valeurs locatives des nouveaux logements. Elle porte les loyers maximums à trois fois ceux des HBM dont le loyer est réajusté lui aussi de + 30% par rapport à 1937.
Le taux d'effort des locataires s’envole et les nouveaux loyers ne permettent pas l'accueil de ménages à très faibles revenus.
En 1951, pour contourner
cette difficulté le gouvernement invente les normes réduites. Une surface
inférieure de 11m², sans chauffage, sans douche ni lavabo, pour les logements
inférieurs à trois pièces.
La loi du 1er septembre 1948 réorganise le marché du logement avec pour objectif la rentabilisation des capitaux immobiliers investis.
Elle réglemente les loyers, crée l’allocation logement et définit les grandes orientations en matière de politique du logement.
Elle s’applique aux logements construits avant 1948.
Elle doit permettre une amélioration du patrimoine par leur propriétaire mais également de relancer la construction neuve en libérant totalement les loyers des logements construits après 1948.
Les loyers sont réglementés en fonction de la valeur d’usage des logements
sur la base d’un loyer « scientifique » calculé sur la « surface
corrigée ».
La loi détermine le loyer « juste », tenant compte de la rentabilité du capital investi, de l’entretien, des frais de gestion et du service rendu. Pour compenser les contraintes de la loi, est créé un Fonds National pour l’Amélioration de l’Habitat (ancêtre de l’ANAH).
La loi impose le maintien dans les lieux des locataires d’immeubles construits avant 1948 et de tous les locataires du parc HLM. Son décret d’application du 30 décembre 48 institue l’allocation logement.
Conception : L'Union sociale pour l'habitat - DCOM - Centre de ressources & Patrick Kamoun
Textes : Patrick Kamoun
Numérisation des documents : Azentis